vendredi 28 septembre 2012

Le futur antérieur de la photographie


© Yannick Vigouroux, « Porto, 2000 » (Lomo LC-A)





J'aime les temps paradoxaux tels que le futur antérieur.

Porto, 2000. Le souvenir du café le matin, la terrasse du Grande Hotel Paris donnant sur la vieille ville et ses clochers, l'effervescence et le fourmillement des piétons pressés sur la place de la Liberté, et cette lumière blanche brulant déjà les mosaïques de pavés clairs : une immense et lumineuse, douce vibration de bien-être me submerge quand je regarde les photos prises cette année-là...
  
Je ne photographie pas seulement pour conserver des souvenirs des voyages qui m'ont souvent conduit ces dernières années dans les villes portuaires de la Méditteranée, mais pour me souvenir, plus tard.

La boîte 6 x 9 cm, et les autres appareils-jouets, furent et restent pour moi les outils les plus humbles et les plus aptes à capter ce futur antérieur.

FOTO POVERA : « CONCEPT » ou « PERCEPT »?


© Yannick Vigouroux, 
 « Les particules indomptables de la Foto Povera.  
Chez Driss, 26 septembre 2012 » (Poladroid)




On me demande souvent quel est « concept » de la « Foto Povera ». Il n'y en a pas. Dans ma pratique en tout cas. La grande question, et l'espace d'expérimentation, relèvent avant tout du « PERCEPT ». A développer, et surtout explorer...

jeudi 20 septembre 2012

La gargoulette Kodak

J'ai retrouvé hier soir cette photocopie envoyée par Bernard Plossu :


« La gargoulette est un récipient en argile, de forme humaine, croupe évasée et torse étroit, dont on se sert pour garder l'eau fraîche. Dans les quartiers pauvres, les gargoulettes blanches est sur toutes les fenêtres. Entre la partie renflée et la partie étroite, un filtre, d'argile lui aussi, qui fut longtemps artistiquement "travaillé". L'artisan empruntait à la flore ou à la faune des motifs variés, comme autant de filigranes qui ne pouvaient être découverts qu'en brisant la gargoulette.
[…]

A l'âge de six ans, un petit Kodak, offert par son père, lui inspira une passion qui dure encore. Des motifs furtifs peuvent être happés, comme capturés sur papier blanc soit pour aider la mémoire , soit pour prolonger le plaisir de certains instants. »

(Henri El-Kayem, Par grand vent d'est avec rafales, 1989)



Les gargoulettes empilées contre les murs que j'ai photographié à Djerba avec une box Kodak 6x9 cm en 1999 servent quant à elles à capturer des poulpes. Pièges à poulpes, pièges à images... la ou plutôt les métaphores peuvent être filées à l'infini semble-t-il.

Enfant, dans les années 1970, face à l'Instamatix de mes parents, j'étais fasciné par l'idée que l'appareil permette de faire des images bien sûr, mais aussi l'idée qu'il en contienne déjà, emprisonnées mais pas encore révélées (c'est ainsi que l'enfant éventre parfois des appareils voire des petits animaux avec une cruauté qui n'a rien d'innocente, dans la tentative, souvent veine, de comprendre comment ça marche...). J'apprendrai bien plus tard que l'on nomme ces images qui existent mais ne sont pas encore visibles des « images latentes ».

mercredi 19 septembre 2012

Esthétique du banal et angles morts



© Yannick Vigouroux, « Venise, sept. 1999 » 
(Polaroid Image, coll. privée)






C'est juste un angle de rue ou de maison, et quel que soit l'endroit où il est photographié, par moi ou un autre, il me semble familier. Comme un fragment d'intimité dont la principale qualité serait d'en être justement dépourvu, de cette qualité.

Pas d'angoisse lynchienne toutefois, je ne redoute aucune créature menaçante (comme dans Mulholand Drive, 2001) qui pourrait surgir de ce faux ou vrai angle mort...

Je songe plutôt, à force de répéter les mêmes motifs d'image en image, sans jamais me lasser, à ces lignes d'Edward Hopper auquel une grande retrospective sera consacrée dans quelques jours à Paris (http://www.grandpalais.fr/grandformat/exposition/edward-hopper/) :

« … Ce que j'ai voulu faire est peindre la lumière sur le côté d'une maison ».


vendredi 14 septembre 2012

Le sténo-film numérique « Islande # 1 » de Juliette Agnel projeté dans son van à Cayeux-sur-Mer du 21 au 23 septembre 2012





© Juliette Agnel





Le week-end du 21, 22 et 23 septembre 2012, le combi de Juliette Agnel sera transformé en salle de projection à CAYEUX-SUR-MER pour OFF SHORT pour montrer son film  Islande # 1 tourné en camera obscura numérique.

Le film de Catherine Alvès et Nathalie Battus, Invisible, sera aussi projeté.

dimanche 9 septembre 2012

Vues sur la mer



© Yannick Vigouroux « Bernières-sur-Mer », 6 sept. 2012 (Fuji Instax Wide)



Pendant cette première semaine de septembre, j’ai longé la Côte de Nacre à bicyclette presque tous les jours, et il en résulte nombre de polaroids, et quelques instantanés, faux panoramiques réalisés avec mon appareil Fuji Instax Wide. C’est le cas de ce petit hommage estival à Luigi Ghirri (l’un des premiers à revendiquer la couleur comme un moyen d’expression « noble » dans les années 1970) à ses photos de rivages et à ses « cadres dans le cadres » (http://define-us.blogspot.fr/2011/04/luigi-ghirri.html) qui m’ont beaucoup influencé.

J’ai songé aussi, une fois de plus, à Une Histoire de bleu (1994) de Jean-Michel Maulpoix :
« Ils regardent le bleu, mais ne sauront jamais le dire.
Le monde est un vaste pays inconnu que l’on contemple depuis les terrasses. On choisit les chambres avec vues, celles qui donnent sur la mer, même si l’on sait que la mer ne se donne pas. »

jeudi 6 septembre 2012

The Gui-Gui Syndrome, September 2012


 

 
© Yannick Vigouroux, « Courseulles-sur-Mer, 2 sept. 2012 » (Poladroid)

 
 
 

Comme les churos en Espagne et dans le sud de la France, la gui-gui est ici une véritable institution balnéaire pour les enfants, un rituel gourmand indémodable. Les boutiques omniprésentes  viennent de fermer.
A Lion-sur-Mer, le vent souffle fort. Hors saison, nous sommes la veille de la « rentrée scolaire » et la plage est quasi déserte. C’est ma saison préférée, la fin de quelque chose et surtout  le début de la lumière automnale sourde, douce, jamais écrasée.
 
 

 
© Yannick Vigouroux, « Lion-sur-Mer, 5 sept. 2012 » (Poladroid)

 
Je découvre que la mairie a miniaturisé les cabines de plage pour en faire des panneaux d’information : photo !...
Photos aussi de cet homme qui retient fermement, allongé sur le sable son parasol jaune qui menace de s’envoler, photos de tous ces acteurs silencieux d’un espace suspendu qui  se déplacent lentement, chorégraphie étrange où les points de suspension ponctuent sans cesse la partition de l’incertain :  l’un des credos de Foto Povera, dont la « rentrée » aura elle lieu non pas en septembre mais en novembre, à la galerie Satellite (Paris IXe) et la Médiathèque Marguerite Duras (Pas XXe)…